Face à la montée des taux d’intérêt et à une concurrence accrue des livrets réglementés, les fonds en euros, pierre angulaire de l’assurance-vie en France, sont sous pression pour offrir des rendements attractifs. En 2023, ils ont affiché un rendement moyen de 2,6 %, un chiffre encourageant mais toujours légèrement en deçà du Livret A à 3 %. Les prévisions pour 2024 indiquent une stabilité, avec un rendement moyen attendu autour de 2,5 %.
Des réserves mobilisées pour soutenir les rendements
Pour faire face à cette concurrence, les assureurs ont activement utilisé leurs outils de lissage, notamment les provisions pour participation aux bénéfices (PPB). En 2023, ces réserves, constituées lors des années fastes, ont permis de maintenir des rendements compétitifs en absorbant une partie des chocs financiers. En moyenne, 38 centimes de PPB ont été utilisés pour chaque euro collecté, contribuant à stabiliser les taux.
Selon l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), cette politique devrait se prolonger en 2024 et 2025. Cependant, la capacité des assureurs à continuer de mobiliser ces réserves repose sur leur volume, encore jugé confortable par des analystes comme GoodValueforMoney. Ces provisions représentaient 4,45 % des encours fin 2023, contre 4,83 % un an plus tôt.
2024 : des perspectives modérées mais rassurantes
Alors que le taux du Livret A devrait baisser à 2,5 % en février 2025, les fonds euros pourraient s'aligner sur ce rendement, avec des prévisions indiquant un taux moyen légèrement inférieur à celui de 2023. Cette baisse modérée, combinée à une inflation estimée à 2 %, marquerait un retour à des rendements réels positifs, contrairement à 2023, où l'inflation à 4,9 % avait amputé les gains réels des épargnants.
Certains assureurs se démarqueront toutefois avec des rendements plus compétitifs. C’est le cas de la MIF, qui prévoit déjà une amélioration de son taux en 2024, selon son directeur général Olivier Sentis. Par ailleurs, les offres promotionnelles, bien que moins généreuses qu’en 2023, devraient continuer d’attirer de nouveaux clients, comme l’indique Philippe Crevel, directeur général du Cercle de l’Épargne.
Des outils robustes pour protéger les rendements et la stabilité
Les fonds euros s’appuient sur des mécanismes éprouvés pour maintenir des rendements attractifs et gérer les risques financiers. Ces outils comprennent :
• La Provision pour Participation aux Bénéfices (PPB) : constituée des excédents réalisés lors des bonnes années, elle permet de lisser les rendements dans le temps et de stabiliser les taux offerts aux épargnants.
• La Réserve de Capitalisation : utilisée pour absorber les fluctuations des marchés obligataires, elle garantit une gestion stable face aux pertes liées à des ventes d’obligations à taux bas.
• La Provision pour Dépréciation Durable (PDD) : protège les réserves des assureurs en cas de dépréciation prolongée des actifs.
• La Provision pour Risque d’Exigibilité (PRE) : assure la liquidité nécessaire en cas de rachats massifs par les épargnants, évitant ainsi des tensions sur les actifs sous-jacents.
Ces instruments, combinés à une gestion rigoureuse des portefeuilles, permettent aux assureurs de faire face aux défis d’un marché en constante évolution tout en offrant une sécurité maximale aux épargnants.
Des stratégies d’investissement adaptées aux marchés
Pour conserver leur compétitivité, les assureurs ont ajusté leurs portefeuilles. En vendant des obligations anciennes à faible taux, souvent à perte, ils ont pu réinvestir dans des titres plus rémunérateurs. Par exemple, Predica, filiale du Crédit Agricole, a revendu pour 11,5 milliards d'euros d'obligations en 2023 pour acquérir des actifs affichant un rendement moyen de 4,21 %.
Cette stratégie proactive, combinée aux outils de stabilisation mentionnés, a permis d’absorber les chocs obligataires récents sans compromettre la solidité financière des assureurs.
Un avenir prometteur malgré des défis persistants
Malgré une concurrence féroce et des marchés financiers en constante évolution, les fonds euros restent un pilier de l’épargne des Français. En 2024, leur performance pourrait légèrement fléchir, mais des rendements réels positifs et une gestion rigoureuse des réserves devraient rassurer les épargnants.
Pour les investisseurs à la recherche de stabilité, les fonds euros continueront d’offrir une alternative sécurisée, tandis que les assureurs vie, grâce à des stratégies adaptées et des mécanismes de protection éprouvés, pourront maintenir leur attractivité sur un marché toujours plus compétitif.